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"Laisser la possibilité à plus d’élèves de découvrir les cultures antiques"

"Laisser la possibilité à plus d’élèves de découvrir les cultures antiques"
Marie Duru-Bellat est sociologue, spécialiste des inégalités dans le système scolaire. Nous l’avons interrogée sur la réforme du collège. Rencontre.

Lea : Que pensez-vous de la création d’un cycle 4 ?

M. D-B : Instaurer des cycles en primaire était une très bonne idée. Au niveau du secondaire, je suis plus partagée. Ce sera moins révolutionnaire car les programmes sont très précis et très chargés. Je ne vois pas très bien ce que cela va changer. Ce sera sans doute moins porteur d’innovation et de progrès que ça ne l’a été dans le primaire. Mais il faut attendre d’avoir assez de recul et mettre en place des évaluations qui permettent de faire une analyse. Il faudrait connaître les raisons qui ont été invoquées pour mettre en place un cycle 4.

Lea : Dans ce cas, comment mettre en place une continuité école-collège ?

M. D-B : C’est un serpent de mer. Beaucoup d’initiatives sont mises en place dans les établissements comme des échanges entre enseignants, des visites réciproques… Ce qui interroge, à terme, c’est la notion "d’école moyenne" : dans la plupart des pays qui fonctionnent bien, on a une école unique jusqu’à la fin du tronc commun, avec des enseignants qui sont formés de la même manière. Dans certains pays du nord les enseignants suivent les élèves tout au long de leur scolarité obligatoire. Mais en France, vu les polémiques que crée une réforme qui n’est même pas révolutionnaire, cela semble impossible. Cela devrait passer par une initiation du corps enseignant.

Lea : Vous prônez un changement de pédagogie, que préconisez-vous ?

M. D-B : J’observe surtout les recherches. Beaucoup de travaux montrent notamment que la manière dont les enseignants gèrent les comparaisons sociales dans leur classe a une influence. Ce qui est néfaste pour les élèves les plus faibles, ce qui va les "enfoncer", ce sont les pratiques enseignantes qui consistent à rendre très visibles les classements, les meilleurs élèves… autant d’éléments qui durcissent le climat de la classe. Les élèves se comparent beaucoup entre eux et les plus faibles sont dévalorisés par certaines de ces pratiques enseignantes et développent ainsi une moindre confiance en eux.

Les enseignants devraient être formés à la recherche sur les effets de ces pratiques. On sait aussi que les pratiques plutôt directives sont plus efficaces avec les élèves les plus faibles. Si on leur laisse trop d’initiatives, ça risque au contraire de les déconcerter. Ces études existent, il faudrait les étudier en ESPE.

Lea : Est-ce que l’introduction des EPI au collège s’inscrit dans ces changements ?

M. D-B : C’est potentiellement intéressant. Ce qui est très choquant ce sont les réactions actuelles des enseignants des disciplines qui ont l’air de penser "on ne va rien apprendre"...

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