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Serge Tisseron : Pour une meilleure utilisation du numérique à l’école

Serge Tisseron - Utilisation du numérique à l'école
© Claude Truong-Ngoc / Wikimedia Commons
Serge Tisseron est docteur en psychologie, psychiatre, et membre de l’académie des technologies depuis 2015. Son travail de recherches et de publications a porté successivement sur les secrets de famille, les relations que nous établissons avec les images et nos rapports aux nouvelles technologies. Il plaide pour de vrais projets d’établissements autour de l’utilisation du numérique.

Comment les enseignants abordent-ils les outils numériques en classe ?

Serge Tisseron : Beaucoup d’enseignants désirent s’engager dans le numérique, mais ils éprouvent souvent des difficultés à trouver des usages concrets aux outils qu’il propose. N’oublions pas non plus la crainte de faire fausse route et de se retrouver sous la risée de collègues hostiles au numérique s’ils n’y arrivent pas. Certains ont également peur de perdre le contrôle sur leur classe, voire de perdre la face auprès des élèves.

C’est pourquoi l’introduction du numérique ne peut bien fonctionner que quand c’est un projet d’établissement, c'est-à-dire quand un directeur s’y implique. Il incite les enseignants à introduire de nouvelles dynamiques de classe, il les soutient dans leurs prises de risque, et il les encourage à échanger entre eux autour de leurs pratiques.

Quels sont les outils qui vous semblent les mieux adaptés à l’école ?

S.T. : Les tablettes ont été beaucoup poussées dans les départements, mais elles sont plus adaptées au jeu qu’aux apprentissages scolaires. Elles sont toutefois très utiles pour surmonter des handicaps sensori-moteurs et relationnels. Les ordinateurs sont mieux adaptés à l’apprentissage du langage de programmation parce qu’ils ont un clavier physique. Mais l’important est toujours d’inciter les enfants à travailler ensemble.

Et le tableau blanc interactif ?

S.T. : C’est un excellent outil, mais son obstacle principal est la formation des enseignants. Il est plus facile de trouver l’argent pour l’installer que pour former leurs utilisateurs. Dans certaines écoles, ce TBI a même été surnommé le "Tableau Blanc Inutile" ! Les jeunes enseignants sont motivés, maîtrisent l’usage du numérique, mais le TBI suppose un haut degré de familiarisation. Alors, vous imaginez avec des enseignants de plus de 50 ans ! Ils ont reçu une formation dans la gestion de classe, mais le TBI requiert des formations davantage reliées à la gestion des activités.

Vous appréciez les appareils photos numériques…

S.T. : J’ai lancé plusieurs festivals avec l’utilisation d’appareils photo numériques. Je pense que c’est un outil formidable. Ils stimulent la créativité et le travail de groupe, et en plus, si on prend du temps pour parler des images, ils favorisent les échanges entre l’intelligence visuo-spatiale et l’intelligence verbale. Il faut absolument éviter que des enfants utilisent chez eux des outils numériques qui mettent en avant des images sans parole, comme beaucoup de jeux vidéo, et qu’à l’école, ils n’aient affaire qu’à du langage parlé. Ce clivage tue la créativité. Il faut encourager...

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