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Entretien

Dominique Bérody : "Un art fondamentalement enfantin"

Dominique Bérody : "Un art fondamentalement enfantin"
© Jean-Marc Lobbé
Spécialiste du théâtre contemporain, Dominique Bérody* nous rappelle que les enfants doivent toujours être considérés comme des spectateurs à part entière, entretenant avec les oeuvres une relation singulière...

Comment définir le théâtre jeune public ? Possède-t-il les mêmes caractéristiques que le théâtre dit pour adultes ?
Dominique Bérody : Le théâtre jeune public est avant tout du théâtre. Les questions qu’il pose doivent être les mêmes que celles que pose le théâtre pour adultes. Ce n’est pas la catégorie de public visée qui définit un art, c’est plutôt un art qui se destine, s’adresse, va à la rencontre de publics qui, quel que soit leur âge, sont des spectateurs à part entière. Il ne doit pas non plus y avoir de réduction de l’oeuvre. Celle-ci est adressée à des enfants, parce qu’un auteur, un metteur en scène, des acteurs ont envie de raconter quelque chose à un moment donné à des jeunes, mais sans adopter une conception réductrice de l’enfant ou du théâtre. Trop souvent, la destination est devenue spécialisation. Comme si on savait ce qu’il faut a priori pour des enfants de cinq ans. Non, les enfants comme les adultes sont dotés d’une sensibilité, d’une capacité à s’émouvoir, à recevoir une oeuvre qui va leur poser des questions et les faire réfléchir. L’adresse au jeune public ne doit surtout pas devenir un prétexte à la production d’une sorte de “prêt à penser” pour enfants. La relation à l’oeuvre doit rester complexe, susciter le rêve, et ne pas tout dire.

Les auteurs de théâtre ont-ils toujours eu envie de s’adresser aux enfants ?
D.B : En fait, il s’est passé dans le domaine du théâtre ce qui est arrivé dans celui de la littérature. Jusqu’à la fin du xixe siècle, on considérait que les enfants ne pouvaient pas avoir accès aux oeuvres littéraires. On adaptait donc les grands textes, contes ou mythes fondateurs par exemple, en les simplifiant ou en les résumant, afin de les mettre à portée des jeunes lecteurs. On concoctait ainsi une sorte de café “lyophilisé”, une paralittérature ! Et puis, il y a eu une période où l’on a pensé que le théâtre pouvait participer aux apprentissages : pour transmettre des leçons de morale, délivrer des messages qui suppléaient aux besoins d’éducation de la jeunesse. Cela a donné des pièces didactiques et schématiques, qui manquaient en définitive de dimension artistique, car s’emparant de la forme théâtrale
au détriment de l’art lui-même.

Qu’est-ce que l’enfant peut ressentir de "plus" en allant au spectacle ?
D.B : Le théâtre est un art polysémique, qui utilise une grande étendue de signes et fait appel à tous les sens. Il transporte donc les spectateurs dans une atmosphère magique. Il offre un prolongement de la vie sous une autre forme, et la possibilité de s’identifier avec des personnages de façon plus immédiate que ne le permet la lecture passant, elle, par le biais de...

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